La communication publiée sous le titre ci-dessus en 2010 par des chercheurs de l’université de Tokyo prend du relief avec le récent séisme au Japon. On sait déjà combien Twitter peut permettre de transmettre et d’agréger des infos, des sentiments voire des foules en temps réel ou quasi-réel. Cette étude cherche à montrer qu’il pourrait aussi être utilisé comme système de détection d’événements et d’alerte. De quoi s’agit-il ?
L’observation montre que chaque événement important est relayé en temps réel par un nombre significatif de tweets. C’est le cas d’un séisme.
L’utilisateur comme capteur
Chaque utilisateur de Twitter se comporte alors comme un capteur qui saisit et transmet une information.
Le monitoring des messages associé à un algorithme adapté permettent l’identification et l’analyse sémantique de mots-clés et du contexte de ces messages. On peut ainsi détecter le séisme et lui attribuer une localisation spatiale et temporelle. Dès que le système extrait l’information, il la transmet automatiquement par mail aux souscripteurs du service qui la reçoivent avant l’alerte officielle et potentiellement même avant l’arrivée des vibrations qui, elles, ne se propagent « qu’à » quelques km/s. Selon les auteurs de l’étude, 96% des séismes d’intensité 3 et plus auraient ainsi été détectés. (à consulter la communication)
Des capteurs sociaux qui permettent une diffusion véloce, quasi-instantanée…
Même si cela paraît dérisoire au regard de l’ampleur de la catastrophe japonaise, on peut être fasciné par le fait qu’un capteur social puisse en quelque sorte court-circuiter les capteurs techniques habituels ;
l’extension et la puissance des réseaux permettent à l’immatérialité des flux de communication en temps réel de prendre l’avantage. Pourrait-on extrapoler ce qui est possible pour les séismes à la détection d’événements politiques, sociaux, météo, accidentels, … à partir de Twitter et à une automatisation de l’élaboration et de la diffusion de l’information en temps réel (type dernières nouvelles – breaking news) ? L’exploitation de Twitter non seulement comme réseau, mais comme média pose certes des problèmes complexes, mais certains y travaillent. On voit bien les objections : quid des sources, de la hiérarchisation, des manipulations ? quelle place pour l’analyse face à l’émotion ? etc…
Comme l’a pointé depuis déjà longtemps Paul Virilio, la vitesse technologique est désormais très supérieure à celle du temps humain, et l’écart ne fait que croître.
Il y a désynchronisation entre la vitesse de circulation de l’information et nos capacités d’action ou de réaction. Cette course à la vitesse semble pourtant inséparable de la course à la puissance dans laquelle nous sommes irréversiblement ( ?) engagés ; et Virilio et quelques autres de rappeler qu’en inventant un processus, on invente l’accident associé ; et que la puissance de l’un et de l’autre croissent parallèlement. Prudence, donc…
Pour réflexion :
“Les moyens de télécommunication, non contents de restreindre l’étendue, abolissent aussi toute durée, tout délai de transmission des messages, des images. Comment vivre vraiment « ici » si tout est maintenant ?”
Paul Virilio / Le Monde de l’éducation – Juillet – Août 2001